La problématique de la responsabilité du titulaire de la carte grise aux termes de l’article L121-3 du Code de la route
Il est prévu que le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l’amende encourue, notamment pour les contraventions d’excès de vitesse.
Ce texte est donc invoqué par les parties lorsque l’identification du conducteur est impossible et qu’il n’est pas possible de dénoncer la personne au volant.
Le juge retient alors la présomption de responsabilité pécuniaire.
Le titulaire de la carte grise paie l’amende mais ne perd aucun point.
La chambre criminelle de la Cour de cassation, le 8 novembre 2011 (n°1181753), a rappelé ce principe en censurant la décision d’une juridiction de proximité déclarant coupable d’excès de vitesse le titulaire du certificat d’immatriculation tout en le dispensant de peines. La dispense de peine n’ayant aucun fondement dès lors qu’en réalité, sa responsabilité pénale n’a pas été engagée.
Il s’agit d’une application de l’article L121-3 posant la présomption de responsabilité pécuniaire par dérogation aux principes de l’article L121-1 du même code, c’est-à-dire la responsabilité Pénale du conducteur.
A partir du moment où le juge établit que c’est bien le prévenu qui a commis les faits, il doit en toute logique engager sa responsabilité sur le fondement de l’article L121-1. La solution qui consiste à retenir une présomption de responsabilité et une dispense de peine n’est pas logique juridiquement même si, en termes pratiques, elle a les mêmes conséquences puisque la dispense de peine protège de la perte de points.
En toute hypothèse, cet arrêt de la Cour de cassation de la chambre criminelle repose clairement l’articulation entre la responsabilité du redevable de l’amende encourue et la responsabilité du conducteur.
Il y a donc lieu de retenir que lorsque le conducteur n’est pas identifiable ou n’a pas été dénoncé, seul l’article L121-3 doit s’appliquer le titulaire de la carte grise paie l’amende et aucune perte de points ne doit être imputée à celui qui paie l’amende.
Deuxième question d’actualité : autour de l’identification du conducteur sur les excès de vitesse
Deux arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation, le premier, (Cass. crim. 7 décembre 2011 n°11-85020) et le second, (Cass. crim. 22 novembre 2011 n°11-81500), reviennent sur les modalités d’exonération de la responsabilité du titulaire de la carte grise en cas d’excès de vitesse.
La Cour de cassation exige qu’il soit apporté des éléments de preuve démontrant que le titulaire de la carte grise n’est pas au volant du véhicule pour l’exonérer totalement. Il convient donc de reprendre les principes en matière d’exonération de responsabilité. Le conducteur peut s’exonérer de sa responsabilité dès lors qu’il prouve que quelqu’un d’autre était au volant ou que l’identification de sa personne n’est pas possible, notamment au regard de l’exploitation des photos.
Dans ce cas de figure, le juge de proximité a deux solutions :
– soit il relaxe purement et simplement,
– soit il requalifie sur le titulaire de la carte grise sur le fondement de la responsabilité pécuniaire et l’article L121-3.
L’article L121-3 ne faisant pas poser une présomption irréfragable, il est alors possible à ce moment-là de démontrer, bien qu’étant titulaire de la carte grise, que l’on n’était pas au volant, notamment en rapportant la preuve d’un alibi.
A ce moment-là, le juge de proximité n’a d’autre choix que de relaxer purement et simplement.
Dans l’arrêt de la chambre criminelle du 22 novembre 2011, les juges nîmois avaient condamné le propriétaire d’un véhicule contrôlé en excès de vitesse, bien que la photographie prise le jour des faits ne permettait pas d’identifier la personne conduisant le véhicule mais les juges poursuivaient en estimant qu’il existait à la charge du prévenu, propriétaire de la voiture, une présomption qu’il en était le conducteur.
Or, selon la cour d’appel, il n’apportait pas la preuve contraire et ne fournissait aucun élément probant à l’appui de ses dénégations.
La chambre criminelle censure le raisonnement de la cour d’appel en estimant que celle-ci a opéré un renversement de la charge de la preuve. En toute logique, dès lors qu’il n’est pas établi que le prévenu est le conducteur, ce qui est bien le cas ici, puisque la photographie ne permet pas son identification, les juges n’ont pas le choix : ils doivent relaxer des fins de la poursuite ou éventuellement déclarer coupable le prévenu en qualité de titulaire, c’est-à-dire redevable de l’amende.
La culpabilité doit être prouvée par le ministère public.
Si tel n’est pas le cas, il appartiendra alors seulement au prévenu de démontrer l’existence d’un vol, d’un cas de force majeure ou d’apporter tout élément montrant qu’il ne pouvait pas être le conducteur, mais ceci à l’unique fin d’échapper à sa responsabilité pécuniaire.
L’absence d’identification du conducteur suffit à l’exonérer de sa responsabilité pénale, ce qui est essentiel en termes d’enjeu de perte de points puisque seule la responsabilité du conducteur identifié entraîne une perte de points.
Troisième question d’actualité en matière d’excès de vitesse :la législation relative aux détecteurs de cinémomètres, communément appelé détecteurs de radars
L’article R413-15 du Code de la route interdit, depuis le 11 juillet 2003, « la détention, l’usage ou encore le transport d’un appareil, dispositif ou produit de nature, ou présenté comme étant de nature, à déceler la présence ou à perturber le fonctionnement des radars ».
Pour suivre les recommandations émises le 11 mai 2011 par le comité interministériel de sécurité routière, le pouvoir réglementaire a, par décret du 3 janvier 2012, aggravé la perte de points rattachée à la commission de la contravention prévue à l’article R413-15 du Code de la route.
Le contrevenant perd désormais six points au lieu de deux lorsqu’il utilise un détecteur de radars.
Autrement dit, les appareils ne peuvent plus désormais indiquer l’emplacement des radars et les systèmes communautaires sont donc proscrits. Ils ne pourront signaler que des zones dites à risques, sans pouvoir préciser ou indiquer où se trouve le radar. Les systèmes de Coyote, GPS, etc. permettant les échanges d’informations sont donc devenus illégaux.
Reste floue, néanmoins, la législation dans le cadre des GPS intégrés dans les véhicules qui mentionnent l’emplacement des radars. Aucune disposition légale ne permet à un gendarme ou à un policier de manipuler l’appareil à l’intérieur d’un véhicule ou de demander au conducteur de le faire pour lui. Il est notamment impossible, même en imaginant que la fouille de l’appareil entre dans le domaine de la fouille du véhicule, de s’appuyer sur les dispositions des articles 78-2-2 et suivants du Code de procédure pénale pour justifier une utilisation par l’agent de police de votre GPS intégré.
Aucun texte du Code de procédure pénale, même le texte relatif à la fouille de l’appareil dans le cadre d’une atteinte grave à la sécurité des personnes, ne permettra d’inspecter cette fonction du GPS intégré…
Sans un texte permettant aux autorités de vérifier les données des appareils, l’incrimination risque donc de rester lettre morte, sauf aveux, remise spontanée de l’appareil ou constatation directe par un agent de l’usage du GPS comme détecteur de radars…